La péniche "Le Ville de Sancerre" , à Montceau-les-Mines en 1901.
Le Berry Républicain
11 février 1947
Sancerre - “La Ville de Sancerre” - Magasin flottant
C’est une péniche pas comme les autres. Elle est amarrée à Saint-Satur, non loin du silo, près de la route qui mène à Saint-Bouize. Elle découpe, sur le rideau d’arbres dépouillés qui bordent le canal, une silhouette particulière. Elle possède, en effet, une superstructure élevée, peinte en bleu, à travers les claires-voies, de laquelle on distingue un chargement de pots de grès.
Cette péniche porte le nom de Ville de Sancerre.
Nous pensions qu’elle était spécialement construite pour le transport de poteries - marchandise encombrante, mais relativement peu lourde - et que pour cette raison elle était surélevée.
Mais lorsque nous nous sommes approchés, nous avons été frappés par un léger détail. Sur une ardoise d'écolier, ces quelques mots : “Baisse, 5%”. Cette péniche est un magasin !
Près de la passerelle, deux hommes sont occupés à déballer des pots de grès de caisses pleines de paille qui viennent d'arriver par wagon. Ces deux hommes, ce sont les propriétaires de la péniche magasin, MM Dugenne frères.
Entrons, ou plutôt, montons à bord. Nous sommes accueillis par l'une des maîtresses du logis : dans la cale, pardon, le magasin, où s'alignent vitrines et étagères. Tout ici nous fait oublier que nous sommes sur un bateau. On a plutôt l'impression d'être chez un commerçant ordinaire a voir les objets d'art, les verres, la faïence, la porcelaine, les grès qui emplissent les rayons. Ne serions-nous pas chez quelque grossiste de Limoges ?
Mme Dugenne veut bien répondre à nos questions.
Elle nous explique que la péniche, port d'attache Saint-Satur, n'a plus navigué depuis le début des hostilités. Autrefois, elle suivait les canaux de la région, jusqu'à Roanne et revenait à Saint-Satur deux fois dans l'année.
Pourquoi ne naviguez vous plus ?
Parce que nous n'avons plus assez de marchandise. Mais, dès que tout sera redevenu normal, nous repartirons.
Vous devez aimer cette vie là.
Oui nous sommes là dedans depuis toujours. La Ville de Sancerre appartenait autrefois à nos parents.
Vous devez dans ces conditions, être très connus le long des canaux.
Oui nous avons une grosse clientèle. Mais depuis la guerre, nous avons perdu presque tout contact. Nous ne vendons plus que dans la région.
Êtes vous les seuls commerçants à naviguer ?
Non. Il existe encore deux autres péniches magasins sur les canaux du nord et de l'est, et un bateau théâtre qui parcourait toute la France. Mais nous ne l'avons pas vu depuis bien longtemps.
Ne voilà t'il pas une vie rêvée ? Allier à la fois les profits du commerce et les joies de la navigation ? Quoique cet hiver, il ne faisait pas très chaud à bord de la Ville de Sancerre, et ceci du propre avis de Mme Dugenne.
Mais au printemps !